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12/02/2017
L'histoire est inspirée de faits qui se sont vraiment déroulés au Japon il y a 4 siècles et Martin Scorsese termine son film par une dédicace faite aux "chrétiens japonais" ce qui va assez bien avec le fait que la toute première avant-première ait été faite au Vatican (à vérifier). Le public visé est-il uniquement « chrétien » ou le film pourra-t-il parler à toutes les personnes croyantes ? je pense que la seconde affirmation est la plus juste mais elle exclue, de fait, tous les spectateurs qui n’ont pas la foi dans un ou plusieurs Dieu et c’est bien dommage…
Commençons par le casting avec les 3 têtes d’affiches occidentales :
- Andrew Garfield se retrouve encore une fois dans une histoire de religion après son "Tu ne tueras point". Si ce que j'avais vu dans l'extrait me laissait perplexe, c'est celui qui assure le mieux dans un jeu malheureusement bien peu subtil...
- Adam Driver, qui n'aura réussi à m'enchanter qu'une seule fois à l'écran (dans le très bon "Hungry Hearts") se retrouve encore une fois dans un rôle qu'il ne parvient pas à dépasser. A sa décharge, il n'a que peu de textes. Les scénaristes l’ont oublié alors qu’il aurait amené un double intéressant au personnage d’Andrew Garfield.
- Chuck Norris, quoi ? Ce n'était pas lui ? Bon ok... Liam Neeson, dans un rôle qui ne lui convient pas et qui est écrit n'importe comment, a lui aussi été berné au moment d'accepter de jouer dans le film. Le cheminement de son personnage qui est censé donner un reflet de ce que risque de devenir celui de Garfield est massacré. Il aurait pu montrer une voie de sortie à ce « combat » religieux mais il n’en est rien…
Ces trois remarques permettent de comprendre que le film ne s'intéresse finalement qu'à l'histoire d'un homme, au cheminement de ce dernier qui se retrouve à douter de sa foi et de sa mission. L'avait-il mal préparée ? Se serait-il trompé de cible ? Lui pensait retrouver son mentor en territoire hostile. Si ce dernier l'était vraiment, sa place pris auprès des chrétiens locaux va le dépasser.
La religion ? Nécessaire pour certains, superflue pour d'autres... tant qu'elle reste dans la sphère privée elle m'indiffère mais je ne comprends pas ce besoin d'expansion qu'elles ont le plus souvent. Si l'on pense que "sa" religion est la "meilleure", pourquoi vouloir l'imposer à tous ? C'est une preuve de bienveillance envers autrui ? Mouais...
Le film évoque le fait que les "khiristian" japonais n'auraient que peu en commun avec les chrétiens occidentaux mais je ne vois pas ce que le débat vient faire ici... qu'ils croient en un Dieu, qu'ils rêvent de paradis, grand bien leur fasse... non ? peut-être qu’il aurait fallut développer cet aspect des choses pour vraiment suivre la pensée des scénaristes…
 côté de cela le grand inquisiteur japonais fait tout pour exterminer les chretiens. Est-ce une réflexion sur les liens entre l'église et l'état ? Pourquoi un pays (le Japon en 1600 mais la France en 2017 oú d'autres pays quelle que soit la date) doit il craindre une nouvelle religion ? Parce que cette dernière organise la vie des gens et influence la société ? Se pose alors la question des "aménagements" d'une religion qui, pour s'implanter, à souvent tendance à emprunter aux codes locaux pour s'intégrer sans être rejetée... c'est bien ce qu'elles ont toute fait, non ?
Il serait intéressant d'avoir les avis de dignitaires religieux sur ce film qui questionne sur la place de ces derniers dans l'évangélisation locale : entre la ligne dure (la religion au dépend de la vie) et la ligne souple (ne pas hésiter à apostasier pour sauver sa vie) où mène la croyance ? Est-ce que les deux choix ne mènent pas obligatoirement à la perte progressive de l'esprit religieux, le premier faute de fidèles (s’ils se font tous exterminer), le second par dilution des croyances et égoïsme ?
Combien de mort seront nécessaires pour que le prêtre soit ébranlé ? Le film n'élude pas la question et montre une forme de torture aussi simple que terrible puisque le prêtre est rarement touché dans son corps mais bien plus souvent dans son âme : le scénario ne nous épargne quasiment rien et les plus sensibles auront souvent l'occasion de fermer les yeux entre noyades, immolations, décapitations, strangulations, ...
Tout cela se fait lentement et la question finale est simple : combien de vie humaine est-on prêt à détruire pour garder sa foi ? Est-ce que la divinité suprême censée veiller sur nous peut justifier ces meurtres ? C'est de là que vient le « Silence » du titre : pas de signes biscornus pour aider à la décision... chaque homme doit faire avec sa conscience et assumer.
Le film est longuet et m'a fait pensé à mes cours de philosophie en Terminale lorsque je lisais un sujet que je trouvais bien peu attrayant car une seule réponse me semblait évidente et censée. Avec le recul je me dis qu'aujourd'hui les réponses auraient été moins lapidaires, moins tranchées et sûrement plus intéressantes. 15 ans plus tard le même problématique se présente à moi avec ce film qui n'est pas inintéressant mais qui suit un chemin qui me parle bien peu et ne nourri pas ma réflexion spirituelle ou pratique...
Est ce un mauvais film ? Je ne pense pas... et je l'ai regardé avec plus d'intérêt que les derniers longs métrages du sieur Scorsese mais, au final, la seconde partie est décevante et ne permet pas au film de s'envoler. Il reste donc en rase motte au niveau de la moyenne et j'attendrais quelques jours pour voir si il émargera légèrement au dessus ou légèrement en dessous au moment de mettre une note (oui, je sais, je ne suis pas bienveillant et je continue à noter mais que voulez vous... ).
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